Entrepreneur dès 20 ans, notamment dans la communication, Xavier Rodriguez a ensuite cédé aux sirènes de la hauteur, en devenant cordiste chez Jarnias. Prouvant son goût pour l’ascension, il s’est hissé à la présidence de ce groupe, qui pèse 50 millions d’euros de chiffre d’affaires.
Par Julie Le Bolzer, Les Echos
Des vacances ? Xavier Rodriguez en prendra « peut-être en 2025 ». Pour l’heure, le patron de Jarnias, groupe spécialisé dans les travaux d’accès difficile, multiplie les chantiers. Notamment à Paris, qui se refait une beauté en vue des Jeux olympiques de 2024. Et l’énergique dirigeant de 42 ans d’expliquer, dans un débit à cent à l’heure, que ses équipes sont notamment engagées « dans la reconstruction de Notre-Dame ou encore la campagne de peinture de la Tour Eiffel ».
La Dame de fer, Xavier Rodriguez lui voue un attachement particulier, car il y a exercé, pour Jarnias, le métier de technicien cordiste. En 2018, quatorze ans après ses débuts à ce poste, « et après avoir gravi les échelons, de conducteur de chantier à directeur commercial », ce père de deux enfants est devenu le PDG de Jarnias.
Fondé voilà trente ans, ce groupe implanté à L’Haÿ-les-Roses compte désormais 300 collaborateurs pour 50 millions d’euros de chiffre d’affaires. Le fruit d’une croissance organique et externe. «L’ambition n’est pas de faire la course aux chiffres ; ce sont nos expertises techniques que nous voulons élargir », assure celui qui a procédé à quatre rachats en 2022. Ainsi, sont entrés dans le giron de Jarnias le haut-savoyard Acro BTP, spécialiste de la haute montagne, ou encore le marseillais Profil, expert du nucléaire. Mais aussi, le breton Alti City, professionnel de la pleine mer, et l’isérois Acousteam, compétent dans la dépollution sonore.
Cette diversité d’activités n’est pas pour déplaire au dirigeant qui se décrit comme coutumier des « journées doubles ». « En ce moment, avec les travaux de relance d’une centrale EDF, ou la sécurisation de la Mer de Glace et de l’Aiguille du Midi, nous sommes au coeur de l’actualité, qu’elle soit énergétique ou touristique », estime Xavier Rodriguez, par ailleurs administrateur du groupement des entreprises de restauration des monuments historiques (GMH).
Son « envie de gagner », ce natif de la région lyonnaise dit en avoir toujours été doté. Fils d’une maman solo entrepreneure, il s’est « un peu élevé tout seul, avec le Club Dorothée ». Après un sport-études football, un BTS force de vente et des petits boulots de livreur et de barman, il crée City Cult à l’âge de 20 ans. Cette agence de communication éditait des revues pour le compte d’institutionnels, tel Sciences Po Lyon. Suivra un café-brocante, qu’il cède pour devenir cordiste, attiré par le hors norme.
Rencontré lors de la restauration de la Grande chancellerie de l’ordre de la légion d’honneur, Richard Boyer, dirigeant de Socra, société spécialisée dans la conservation de monuments, voit Xavier Rodriguez comme « un pivot entre passé et futur ». Selon lui, « il associe patrimoine et innovation, toujours à l’affût d’une solution technique ». L’intéressé, lui, se dit «persévérant, voire jusqu’au-boutiste ». Preuve de sa difficulté à décrocher, ce workaholic, alors en congé dans le Grand Canyon, animait une visioconférence « depuis un 4×4, à 4 heures du matin heure locale ».
Sa feuille de route du moment ? Maintenir Jarnias à sa place de leader en France, sur un marché de 650 millions d’euros de chiffre d’affaires. Pour ce faire, la montée en compétences des équipes est sa priorité, d’où la création, en 2023, d’une Académie de la hauteur. A titre personnel, celui qui se partage entre Paris et Sète, où il a posé ses bagages il y a six ans, entend conserver sa capacité d’émerveillement face à des chantiers de haute volée.
Par le passé, Jarnias a habillé le pas de tir de la fusée Ariane en Guyane et même contribué à la création d’un domaine skiable au Kazakhstan. « Des projets extraordinaires, mais pas toujours bons pour la planète, vu le déplacement en avion des hommes et du matériel », glisse ce dirigeant qui envisage désormais de « se rapprocher des clients ». De quoi augurer un déploiement à l’étranger.
Julie Le Bolzer, Les Echos